CENI : L’embarras du pasteur NGOY MULUNDA
Ironie du sort parce qu’il n’y a
pas longtemps le ministre de l’information du gouvernement précédent, M.
Lambert MENDE, déclarait qu’il serait impossible d’organiser les élections
provinciales et locales dans le délai, sinon pas du tout d’élections
provinciales et locales, si les partenaires du gouvernement ne bougeaient pas
leurs poches. Mais pendant que le gouvernement cherche de l’argent pour ces
élections, c’est absurde que la CENI dont le financement est assuré par le
gouvernement et à défaut par ses partenaires repousse la main tendue de la
Belgique. Qu’est-ce qui justifie vraiment
l’attitude de MULUNDA ?
Pour comprendre la position du
pasteur revenons sur ces faits :
1. Les
élections que vient d’organiser le pasteur NGOY MULUNDA n’ont pas connu le même
succès que celles supervisées par son prédécesseur, également homme de Dieu,
l’abbé Apollinaire MALUMALU. La plupart des observateurs nationaux et
internationaux ont estimé que les élections de 2011 étaient non crédibles
relevant plusieurs cas d’irrégularités et de fraudes. Pendant que le pouvoir
sorti de ces élections souffre d’une grave crise de légitimité et tâtonne pour
trouver le pilier sur lequel établir sa stabilité durant cette législature,
c’est maintenant plus de trois mois depuis que le président de la République a
prêté serment mais le gouvernement n’est pas toujours constitué, le principal
challenger du président Kabila, en l’occurrence M. Etienne TSHISEKEDI continue
à rejeter les résultats proclamés par la CENI et confirmés par la Cour suprême
de justice, dont les juges dit-on ont été nommés par le président réélu ;
la mission des NU en RDC vient de publier un rapport mettant en cause les
forces de sécurité, la garde républicaine (GR) proche du président KABILA
notamment, pour des violations des droits de l’homme commis avant, pendant et
après les élections dans la ville de Kinshasa ; et enfin, dans son rapport
final sur les élections, la mission d’observation des élections de l’UE vient de
jeter l’huile sur le feu en qualifiant l’ensemble du processus électoral non
crédible.
Le président de
la CENI de son côté considère les élections qu’il a organisées comme une
réussite, à part quelques problèmes logistiques. Mais à en croire les
différents rapports des missions d’observations et la crise dans laquelle est
plongé le pays au lendemain des élections personne, à part la majorité au
pouvoir qui a bénéficié de l’action du pasteur et dont lui-même est membre, ne
se leurrait à donner du crédit à l’auto satisfaction du pasteur MULUNDA.
2. D’ailleurs,
une opinion consistante considère que la CENI doit être reformé et son bureau,
avec à la tête le pasteur NGOY MULUNDA, doit rendre le tablier. Tant l’Eglise
catholique, une bonne partie de la classe politique, avec en son sein certains
membres de la majorité au pouvoir, que la mission de l’UE recommandent, si pas
demander, la démission du bureau de la CENI et sa reforme pour y intégrer des
acteurs neutres.
En première,
l’Eglise catholique, dont la prise de position considérant les élections de
novembre 2011 comme non conforme à la vérité ni à la justice lui a occasionné
le courroux du pouvoir en place qui a lâché les brides en poussant ses forces
jusque même dans les églises pour réprimer les fidèles qui s’apprêtaient à
manifester pour réclamer la vérité des urnes, a recommandé à l’issue du
conclave des évêques recommandé « A l’Equipe actuelle de la
CENI, d’avoir le courage de se remettre en question,
de corriger impérativement les graves erreurs fustigées qui ont entamé la
confiance de la population en cette institution, sinon de démissionner[1] ».
L’autre voix est
celle de certains partis politiques, pour la plupart proches de l’opposition et
quelques mécontents de la majorité, qui ne jurent que par la tête de MULUNDA
qu’ils désirent ardemment voir démissionner ensemble avec son équipe.
La mission
d’observation de l’UE n’a donc fait qu’enfoncer le clou en recommandant dans
son rapport final la démission du bureau
de la CENI. Son rapport publié le jeudi 29 mars 2012
conclut : « Les résultats des élections présidentielle et
législatives de fin 2011 en République démocratique du Congo ne sont pas
crédibles en raison de nombreuses irrégularités et fraudes » et
recommande : « la restructuration de la Céni en y incluant
la société civile pour contribuer à sa transparence, son indépendance et sa
fiabilité, un audit du fichier électoral …[2]».
Seul contre « tous »,
le Pasteur reste serein et tenace dans son autosatisfaction du travail abattu
par l’organe qu’il dirige et se précipite vigoureusement à repousser toute
action qui le mettrait en cause, fusse une offre de 3 million d’euros de la
Belgique dont pourtant la CENI et le pays ont besoin pour parachever la mise en
place des institutions de cette législature aux niveaux national et provincial,
mais qui pêchent d’être conditionnés par la sommation à la démission de
l’équipe de MULUNDA.
Dors et déjà, considérant sa
vérité « ex cathedra », NGOY MULUNDA a rejeté toute idée de la
démission de son bureau confiant à la presse : « J’ai la
conscience tranquille, ces élections ont été correctes, on n’a pas triché ».
Mais, saura-t-il, quoiqu’au Congo le ridicule ne tue, résister à la quasi
unanimité de l’opinion tant nationale qu’internationale qui réclame sans mâcher
les mots la démission du bureau de la CENI ou persistera-t-il longtemps à
prendre la nation en otage en la privant par ses caprices les aides qui lui
sont pourtant nécessaires pour mettre en place les institutions locales,
provinciales ainsi que le sénat ?
Le bon sens ne pousserait-il pas
un homme dans la situation du Pasteur NGOY MULUNDA à démissionner de son propre
chef, plutôt que d’attendre « un limogeage scandaleux » à
l’africaine ?
A sa place moi en tout cas je
partirai en douceur.
[1] Déclaration
des évêques Catholiques sur la « fraude électorale » en RDC, http://www.aeta-network.org/declaration-des-eveques-catholiques-sur-la-fraude-electorale-en-rdc?lang=fr